CONSTRUCTEUR / ANTEM (1921-1997)Je viens d’acheter le superbe livre d’Olivier de Serres « Citroën TRACTION au Panthéon de l’automobile » qu’il m’a dédicacé suite à notre rencontre à Automédon en octobre 2019. A la première page de la partie consacrée aux « Carrosseries spéciales », il est question des ateliers de la carrosserie Antem de Doudeville, en Seine-Maritime.
Juste au moment où je viens de recevoir la miniature produite par Autocult qui m’inspire cet article, j’apprends que le modèle a l’échelle 1 qui a inspiré le modéliste - réducteur a été établi en 1946, sur la base d’une 15 Six conduite intérieure de 1939 (immatriculation Marne 1939). C’est une grande limousine de 8 places correspondant à la mode de l’après-guerre.
De profil, les lignes sont longues et fuyantes avec de très grandes ailes enveloppantes, celles de l’arrière étant munies d’un cache masquent la roue.
A l’avant, la calandre est resserrée entre de larges ailes aux phares intégrés dont le profil descend jusqu’au pied milieu entraînant une enclave dans la porte avant. A l’arrière, une poupe interminable prolonge l’auto d’une généreuse malle en un long porte-à-faux.
A l’instar de
Robert Clabot, un tel dessin se veut l’expression des théories sur l’aérodynamisme alors très en vogue, et renforcé par des visions des stylistes d’outre-Atlantique.
11 B Cabriolet 2+2 carrossé par Clabot sur une base 1939 1947 KAHN MODELCARS - 2012Mais, d’abord, qui est Jean Antem ? Né Juan Antem à Palma de Majorque aux Baléares, son grand père était charron à Palma de Majorque et son père exerçait le même métier à Barcelone. Il quitte l’Espagne et arrive à Paris en 1910 où il suit une formation de serrurier.
En 1919, après un apprentissage chez VANDEN PLAS, il achète avec son ami Monroig un fond de commerce de carrosserie et fonde avec celui-ci un premier atelier à Levallois-Perret. Les débuts sont laborieux, le travail consistant surtout en des modifications ou des réparations, l’activité carrosserie se bornant pour l'essentiel à de petites série pour ARIES ou LICORNE (chère à notre ami Jean-Pierre alias
PIJO3007).
Mais au fur et à mesure du développement des affaires, le local de la société Antem & Monroig devient trop petit. C'est en 1921 que l'entreprise déménage pour un atelier plus grand à Neuilly.
Pendant la seconde partie des années 1920, Jean Antem passe surtout des contrats dans le domaine de l'utilitaire, notamment avec la préfecture de police.
La carrosserie Antem & Monroig est admise au sein de la chambre syndicale de la carrosserie le 22 mars 1923. La même année, Jean Antem expose pour la première fois au Salon de l'Automobile, au grand palais.
Il se fait une spécialité de dessiner des lignes de ceintures de caisse volontairement abaissées et peintes en contraste, ce qui fait apparaître les voitures plus basses.
Dès 1925, des châssis de marques françaises populaires défilent dans dans l'atelier de carrosserie, Renault, Chenard & Walcker, mais également des voitures de luxe comme Delage ou Panhard & Levassor qui côtoient les marques étrangères, Mercedes ou Rolls. A cette époque Jean Antem semble se spécialiser dans plusieurs types de carrosseries : torpédo, skiff, coupé chauffeur ou berline découvrable.
La croissance est telle qu'il faut ouvrir un second atelier à Courbevoie et s'associer avec un troisième collaborateur, François Guyot la carrosserie prend l'appellation "Antem, Monroig & Guyot".
1929 est une année importante pour Jean Antem, il obtiendra la nationalité française et rachète l'intégralité des parts de la société à ses associés, la carrosserie Antem est née, c'est une carrosserie automobile de renom qui a existé jusqu'en 1998.
Il fait partie des grands carrossiers de luxe établis à Paris dans les années 1920 et 1930. Au cours de toutes ces années, il habilla toutes sortes de châssis dans divers styles, réservant ses créations sur mesure pour des marques de qualité, comme Talbot, Bugatti, Hispano-Suiza et, bien sûr, Delahaye.
Pendant les années 1930, des liens étroits sont établis avec la firme américaine Ford, ce qui permet à Jean Antem de réaliser de nombreux contrats pour fabriquer des camionnettes et des ambulances à partir de châssis Fort et Matford.Il fournit des utilitaires sahariens destinés à un raid colonial. La carrosserie traite aussi beaucoup de réparations pour les ambassades et des consulats d'Amérique latine.
1935 est une période faste pour la carrosserie Antem avec la production d'un cabriolet Delahaye 138S qui participe au concours d'élégance du bois de Boulogne en 1935, un cabriolet quatre places Hispano-Suiza K6 qui participe au même concours, les cabriolets Licorne pour le concours d'élégance du journal "Fémina-L'Intransigeant". Jean Antem passe un contrat avec la marque Licorne pour réaliser en petite série le cabriolet Week-End 11 / 14 CV, proposé au catalogue officiel de la marque.
Pendant la période de guerre la carrosserie concentre son activité sur les réparations et la réalisation de nombreux gazogènes.
En 1941 le voisinage qui mène bataille contre lui depuis de nombreuses années, obtient l'expropriation du carrossier.
Jean Antem acquiert un atelier à Courbevoie. Un magasin d'exposition est bâti après la guerre en 1948, qui permet de disposer d'une bonne façade sociale.
A partir de 1946 Jean Antem et ses fils œuvrent ensemble, Jean junior avec son père à la carrosserie et Jacques à la mécanique.
Jean junior possède de réelles qualités de style, il apporte du sang neuf à la carrosserie. Delahaye passe un accord avec la carrosserie Antem pour la conception et la fabrication de plusieurs petites séries moins surchargées que la plupart de la concurrence. Talbot ne tarde pas à conclure un accord similaire. Dans un tout autre genre Jean Antem obtient un contrat avec la banque de France pour la réalisation et l'entretien de Fourgons de transport de fonds.
Il maintient un haut niveau d'excellence en carrossant des voitures de compétition et des véhicules publicitaires en collaboration avec Philippe Charbonneaux dans les années 1950 comme avec le supercar Pathé-Marconi pour les Compagnons de la Chanson, réalisé à partir d'une semi-remorque Titan.
L'activité cesse en 1955. L'un de ses fils reprend ensuite l'activité à Doudeville en Normandie pour la fabrication de remorques pour voitures particulières et cabines de tracteurs agricoles.
Philippe Charbonneaux charge encore une fois la carrosserie Antem en 1957 de la réalisation du véhicule publicitaire "Porto Da Silva / Champagne Delmotte" sur la base d'une Citroën 2cv.
En 1958, la carrosserie Antem débute la fabrication de caravanes et de remorques de tourisme légères en tôle puis en polyester.
L'atelier de Courbevoie devenu trop exigu pour cette nouvelle production, l'entreprise déménage encore une fois en 1961 à Doudeville en Seine-Maritime.
En 1972, Jean Antem, fondateur de la carrosserie, décède. L'effectif de l'usine est alors de 120 salariés, la production s'oriente uniquement vers les remorques et les camions-magasins destinés aux commerçants itinérants.
En 1986, Jacques et Jean disparaissent à leur tour, respectivement en février et octobre. C'est alors Jean Claude Antem, fils de Jean qui reprend la direction de la carrosserie, jusqu'en 1997. Les actionnaires, tous membres de la famille Antem décident de prendre leur retraite. Faute de repreneur parmi leurs proches, il décide de cesser l'activité pendant que la situation de la société permet encore de le faire dans de bonnes conditions.
La carrosserie Antem aura œuvré pendant 78 années efficaces et novatrices.
On trouve peu de créations de Jean Antem aujourd’hui. Un article de La Vie de l’Auto de janvier 1979 répertoriait seulement quatre Delahaye 135 à carrosserie Antem connues à l’époque. Concurrentes régulières des concours d’élégance les plus prestigieux, ces rares voitures à carrosserie Antem sont très recherchées aujourd’hui.
Quand la grande série rencontre une production uniqueAndré Citroën a écrit l'histoire de l'automobile en 1933, lorsqu'il a décidé, en pleine crise économique, de lancer une voiture particulière techniquement en avance sur son temps. La carrosserie autoportante a particulièrement fait sensation lors de la première présentation, le 18 avril 1934, la suspension agréable et la traction avant ont été largement approuvées. La plus grande version de cette série a été proposée à partir de 1938 et équipée d’un moteur à six cylindres. 78 chevaux pour 2,9 litres ont permis à la berline d'atteindre une vitesse de pointe de 145 km / h. Sans aucun doute, Citroën a joué avec ce modèle dans la première classe automobile française. Le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en 1939 contrecarre des chiffres de production significatifs et interrompt l’assemblage à l’usine du Quai de Javel jusqu’en juin 1941. Remarquablement, cependant, il redémarra en 1946.
Les demandes de renseignements sérieuses et les contrats de vente ultérieurs ont suffi à la direction de Citroën pour reprendre la production.
L'une d'elles a été fournie à la société Carrosserie Antem, dirigée par Jean Antem, alors âgé de 55 ans. Son entreprise s'était spécialisée dans la construction artisanale de carrosseries et avait volontiers recours au châssis des fabricants renommés de Nobel. Rolls-Royce, Mercedes ou Delahaye - il lui semblait également opportun de redessiner une Citroën 15-six. Par rapport aux séries 15-16, ses carrossiers ont donné à leur interprétation des ailes très larges et un arrière rallongé. Avec seulement quelques photos contemporaines, nous pouvons dire à ce jour que c’est peut-être la plus grande voiture de tourisme jamais construite sur la base d'un 15-six.
Pour la société Antem, la grosse Citroën n’a pas eu de chance de commercialisation à grande échelle et, même avec ses autres créations de carrosserie, l’usine ne semblait plus répondre aux goûts de la clientèle, car en 1955, la société arrêta l’atelier de carrosserie.
Un article, une miniature bien sur !15 Six Limousine 8 places Bleu foncé carrossée par Jean Antem 1946 ou 1948 ? AUTOCULT "Concepteurs & petites séries" tirage limité à 333 exemplaires Réf.: 05030 - 2019De profil, les lignes sont longues et fuyantes avec de très grandes ailes enveloppantes, celles de l’arrière étant munies d’un cache masquent la roue.
A l’avant, la calandre est resserrée entre de larges ailes aux phares intégrés dont le profil descend jusqu’au pied milieu entraînant une enclave dans la porte avant. A l’arrière, une poupe interminable prolonge l’auto d’une généreuse malle en un long porte-à-faux.
A tantôt
Alain